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Danse!

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Auteurice Nina Rast, 24 novembre 2022
Illustrateurice

Dans le cadre de la 18e édition du festival Les Créatives sous le signe du clubbing, Habibitch, Hawa Sarita et Zabou Elisabeth Jaquet étaient réuniexs pour la conférence Autour du Club : le monde de la nuit porte conseil. Mais qui sont-iels?

Le festival Les Créatives a organisé plus d’une dizaine de soirées «ultra violettes» dans des clubs partenaires avec une programmation 100% féminine et issue de minorités de genre. Mais le monde de la nuit n’échappe pas aux discriminations, violences et agressions du système patriarcal, capitaliste et raciste qui règne durant le jour. Alors, beaucoup s’engagent à faire de ces espaces des milieux qui leur correspondent.

Subversion de genre, résistance politique et décolonisation, mais aussi liberté, douceur et insouciance, voilà les sujets au coeur de l’engagement de Habibitch, Hawa Sarita et Zabou Elisabeth Jaquet, artistexs, penseureuses, DJs et militantxes de jour comme de nuit.

Habibitch

Habibitch est artiste. Danseureuse et activiste anti-raciste, Habibitch vogue (voir définition) pour Décoloniser le dancefloor, une conférence dansée durant laquelle they performe dans une démarche militante intersectionnelle. Non-binaire, gouine Fem d’originie algérienne, l’intersectionnalité a été une réelle découverte pour they, qui a pu mettre un mot sur ses expériences et ses identités, notamment dans le monde de la nuit. 

Habibitch se dit «clubeuse invétérée et inconditionnelle» et c’est en tant que telx que they raconte l’importance de (re)politiser le dancefloor et en (re)faire un espace de résistance queer et racisé. 

Pour Habibitch, les clubs ne sont pas des espaces neutres. Au contraire, ces espaces seraient chargés politiquement: ils sont des lieux de résistance, de libération et de réappropriation qui sont indispensables aux luttes sociales. Pourtant, ils ne sont pas pour autant des espaces safes… On peut parler par exemple des cas de personnes droguées au GHB à leur insu revenant chaque été. 

«Il n’y a pas d’espaces de l’en-dehors aux systèmes de domination qui nous entourent. J’ai compris que le club en faisait partie, voire même qu’il était une cristallisation de ces systèmes de domination, d’oppressions et de discriminations.»

Habibitch lutte donc pour décoloniser les lieux festifs par l’éducation et la sensibilisation à l’histoire coloniale de la France, en rappelant l’origine des ballrooms et réinvestissant ces espaces en communautés queers et racisées.

Définition: Les ballrooms désignent les espaces de rassemblements de communautés queer et racisées où émerge toute une culture, créatrice notamment du voguing – un style de danse mélangeant breakdance et exagération de la gestuelle des défilés et des poses de magazines. Apparue dans les années 20 à Harlem, New York, les ballrooms sont des espaces de libération et de célébration des personnes queer et racisées.

«Je me suis dit «Bon, casser l’ambiance en soirée, déjà je le fais, donc autant être payé pour.»
– 
Habibitch



Hawa Sarita

Sarah Gamrani, alias Hawa Sarita, est DJ, chanteuse, poétesse et autrice franco-marocaine. Elle, aussi, lutte pour rendre les espaces nocturnes plus inclusifs, mais par une autre approche. Urbaniste de formation, Sarah a décidé de rassembler des femmes et minorités de genre DJ pour réfléchir ensemble aux discriminations et violences présentes dans le monde de la nuit, mais aussi à des moyens de réinventer ces espaces, pour en faire des lieux plus inclusifs et plus safe. Son projet est né dans le cadre de son master et avec l’espoir que la pandémie du covid donne l’impulsion à une réinvention féministe des clubs. Elle invite alors celleux, qui subissent largement de la silenciation, à échanger dans un cadre bienveillant et à s’exprimer grâce, notamment, au médium de la poésie.

«Ce qui m’a le plus marqué, c’est le manque d’espaces bienveillants de parole et d’échange autour de ce que c’est, être une artiste sexisée ou minorisée dans les scènes électroniques. A travers les ateliers d’écriture, on a créé nos propres espaces d’échange et d’expression.»

En plus d’offrir un lieu de parole bienveillant aux participantxes, Sarah Gamrani a créé, avec «Au-delà du club», une archive précieuse des récits, des traumatismes et des rêves d’une communauté minorisée qui veut réinvestir le monde de la nuit.

Zabou Elisabeth Jaquet

Zabou Elisabeth Jaquet, chargée de projets au sein de We Can Dance It, espère justement éviter que les lieux de fête soient à l’origine de traumatismes. Représentante de cette association promouvant l’égalité dans l’espace public et dans le milieu de la nuit, elle travaille à prévenir les violences sexistes et sexuelles en invitant les clubs à œuvrer pour rendre leurs établissements plus safes. 

En tant que coordinatrice et communicante de We Can Dance It, Zabou Elisabeth propose aux clubs différentes formations et dispositifs de sensibilisation destinés à améliorer le sentiment de sécurité de la clientèle et des employéexs et bénévoles de ces lieux. 

Zabou Elisabeth Jaquet s’attriste de l’incapacité des hommes cisgenres, souvent uniques profils détenteurs des postes clés dans les institutions et établissements culturels, à prendre en compte sérieusement leurs demandes. Elle explique que nombreux d’entre eux refusent de laisser la possibilité aux minorités de genre d’organiser des soirées en non-mixité dans leurs espaces.

«Il y a une grosse difficulté à faire passer la mixité choisie aux hommes cisgenres dans leurs lieux. Donc, ce n’est pas quelque chose qu’on va proposer en premier lieu. C’est trop dur pour le patriarcat… On va faire plutôt du pansement.»

Ces pansements – des formations autour de la question «comment pouvons-nous mettre en place des espaces inclusifs, égalitaires, festifs et agréables pour touTes?», la mise en place de stands et d’affiches de prévention, etc. –, l’association We Can Dance It les impose aux divers espaces publiques et festifs qui souhaitent recevoir une labellisation.

Habibitch, Hawa et Zabou, avec leurs approches et leurs parcours si divergents, s’accordent sur un point: le monde de la nuit est un espace précieux, auxquel touxtes devraient avoir accès et dans lequel touxtes devraient se sentir en sécurité.

Ces acteurices de la nuit nous rappellent que leur monde est le nôtre, et qu’il faut en prendre soin comme de nos chambres à nous. 

Alors, venez danser, vous réapproprier votre corps et l’espace nocturne par exemple aux prochaines soirées ULTRAVIOLET!

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