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«Continuum, récits et savoirs LGBTIQ+», ou comment transcender l’identité de genre

«Continuum, récits et savoirs LGBTIQ+», ou comment transcender l’identité de genre

Auteurice Virginia Markus, 1 novembre 2018
Type de publication

Il y a la théorisation de la question du genre et des sexualités, et il y a Continuum, récits et savoirs LGBTIQ+. Reportage au coeur d’une exposition documentée, transversale, interdisciplinaire et poignante.

C’est avec des yeux curieux sans être voyeuristes, que l’on se fait happer par la profondeur des portraits exposés dans la salle d’exposition de l’Université de Genève à Uni Carl Vogt. On y croise des regards sereins, révélateurs d’une résilience forte. Des regards qui viennent toucher le coeur de celles et ceux qui s’y arrêtent un instant. Derrière la personnification des récits, s’inscrivent des mots. «Mais madame, on ne guérit pas de qui l’on est» retrace Lynn, femme trans de Genève, lorsqu’elle relate une rencontre avec le psychiatre qui l’accompagne. C’est cela. Se donner le droit d’être qui l’on est, au-delà des cases dans lesquelles les religions, la législation et la biologie ont tenté, tentent encore parfois, de placer les individus dits «hors normes».

 

© Virginia Markus – Exposition Continuum

C’est en naviguant autour des portraits réalisés par la photographe Neige Sanchez, que l’on se retrouve face à des «tableaux des savoirs» interdisciplinaires, illustrant la transversalité de la question du genre et des sexualités: des savoirs biologiques, sociologiques, anthropologiques, culturels, juridiques et théologiques se transmettent la patate chaude sur la question du genre et des sexualités. On y lira une analyse des écrits bibliques ayant ancré une culpabilisation omnisciente des pratiques sexuelles considérées comme «impures». Ou encore que «deux cases ne suffisent pas», d’un point de vue biologique, pour définir la multitude des développements sexuels possibles. C’est dans ce sens que le projet Sciences, sexes, identités de l’Université de Genève s’est allié à Continuum en produisant la brochure Sexesss, selon laquelle «une vision binaire (femelle/mâle) est donc réductrice est dépassée». Et à l’écoute des récits illustrés dans l’exposition, il y aurait autant d’identités sexuelles et de genre que d’individus sur terre.

 

Des liens plutôt que des limites

C’est avec sensibilité et engagement que Ferdinando Miranda, chargé de projets au Service de l’égalité de l’Université de Genève et Commissaire de l’exposition, conte l’historique et la vocation du projet Continuum. Partant d’une volonté politique de mettre en lumière des savoirs scientifiques pluridisciplinaires, a découlé la matérialisation de l’exposition: partir des personnes concernées par la question du genre et des sexualités dites minoritaires, pour construire et illustrer des savoirs transversaux et académiques. «From bottom to top», illustre Ferdinando Miranda, qui défend ce qu’il considère être une valeur de justice. L’un des buts principaux de Continuum? Permettre une mise en valeur et une reconnaissance du travail militant initié par des activistes concernéEs, préalable à la constitution de savoirs académiques. Un engagement de terrain ayant permis de faire émerger cette préoccupation auprès des institutions officielles, en somme.

© Continuum – Affiche de l’exposition

Alors que les portraits photographiques illustrent des réalités singulières, le commissaire de l’exposition insiste sur le fait qu’il ne s’agit pas de constituer des porte-paroles des questions LGBTIQ+, mais bien de «mettre l’accent sur le regard de l’individu, pour sortir du stéréotype». Ne pas cristalliser une stigmatisation de «l’autre», mais révéler sa singularité et parallèlement, son lien intrinsèque d’individu avec ses propres ressentis, valeurs, besoins et droits, avec les autres habitantEs de la planète. Dans ce sens, l’exposition met l’accent sur les liens d’interdépendance bordant la thématique LGBTIQ+ notamment par l’éducation, la culture en société et les religions. Qu’il s’agisse de mettre en valeur la complémentarité des approches militantes ou la pluridisciplinarité des savoirs, le but est de poursuivre la lutte politique aspirant à une reconnaissance transversale de la singularité des identités et viser leur acceptation. En construisant «des ponts», Ferdinando Miranda tient à élaborer les interrogations découlant de la question de genre et des sexualités en permettant «des rencontres» avec des personnes concernées. Il importe d’ouvrir la question «vers la cité, afin de mettre en dialogue ce que fait l’Université avec les publics extérieurs».

 

Des moyens pour une même fin

En parallèle de l’exposition, c’est une panoplie multicolore d’outils qui est mise au profit de la visibilisation des «récits et savoirs LGBTIQ+»: performance artistique, discussions, rencontres, conférences, jeux mais aussi formations spécifiques à des enseignantEs et activités scolaires. Une complémentarité remarquable entre la théorisation de la question et l’application pratique de la reconnaissance de cetTE «autre» duquel et de laquelle nous sommes étroitement liéEs de par notre essence d’être vivant. «Pourquoi les autres auraient plus le droit d’être dans la rue que moi?» s’est un jour demandé Rémy de Genève. Ainsi, la revendication de droits égalitaires a amené les initiantEs du projet Continuum à questionner la réalité passée et actuelle des personnes dont l’identité de genre ou la sexualité ne sont pas majoritaires. Parce qu’il y a davantage de liens que de cases réelles, la continuité des questionnements ne trouvera de fin que lorsque l’acceptation universelle des droits fondamentaux pour autrui sera devenue la seule et unique «norme» à suivre. Et n’est-ce pas la moindre des choses?

 

© Virginia Markus – Exposition Continuum

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