Battle of the Sexes est un film américano-britannique qui raconte l’histoire d’une femme qui a décidé de se battre pour ne pas être discriminée. La championne, devenue première mondiale suite à de nombreuses victoires, prend rapidement conscience du sexisme qui règne dans son milieu quand elle se voit promettre un huitième du premier prix pour les hommes, et ce malgré le même nombre de billets vendus. Elle décide alors de faire le pari risqué de quitter le circuit professionnel pour fonder, avec le soutien de quelques joueuses et de son amie n, la Women’s Tennis Association (WTA) en 1973. La WTA est actuellement la principale association sportive de tennis qui organise les compétitions professionnelles des femmes. Bien que les débuts de l’associations soient présentés à l’écran, le film est surtout focalisé sur le match d’anthologie que Billie Jean King jouera contre Bobby Riggs, machiste notoire, qui disait vouloir remettre les femmes à leur place. La victoire de Billie Jeanne King marquera un tournant dans la lutte des femmes pour l’égalité, particulièrement dans le milieu sportif, en se révélant un immense succès médiatique. En marge du féminisme, le scénariste britannique Simon Beaufoy (Slumdog Millionaire) aborde l’homosexualité de la joueuse de tennis, qu’elle accepte au fil du film.

De l’Antiquité à nos jours, une question persistante

Cette disparité des primes entre hommes et femmes rappelle un problème bien actuel qui sévit dans ce milieu, construit par et pour les hommes. Pierre de Coubertin – rénovateur des Jeux Olympiques modernes – l’exprimait bien : « Aux Jeux Olympiques, leur rôle devrait être surtout, comme aux anciens tournois, de couronner les vainqueurs ». Par les hommes et pour les hommes, le sport est historiquement constitué ainsi. Béatrice Barbusse – sociologue et sportive française – explique dans un entretien accordé au magazine français Les Inrokuptibles que dès l’Antiquité, les hommes devaient s’entraîner au combat en temps de paix. C’est là qu’on en faisait “des hommes”, en leur inculquant notamment des valeurs associées à la masculinité telles que le courage, la dureté. Parallèlement, elle relève que la fonction des femmes était alors d’être maternelle et séductrice, à l’opposé donc des valeurs promues par le sport.

Les femmes, longtemps ancrées dans l’imaginaire collectif comme devant restées au foyer, ne sont donc pas attendues dans des milieux sportifs, souvent rattachés à des valeurs de masculinité et de virilité.

Quel habit pour une femme sportive?

Catherine Louveau – sociologue française – confirme cela en rappelant que déjà dans les années 60, les femmes subissaient un « procès de virilisation ». Ces dernières devaient être soumises à des contrôles de féminité lorsqu’elles concouraient au niveau international. La question sous-jacente : des femmes performantes sont-elles vraiment des femmes ?

Il ne faut toutefois pas qu’elle en vienne à investir les milieux masculins, et doit pour cela se cantonner à des sports et des tenues mettant en valeur sa « féminité ». Le volley sera bien plus médiatisé que la femme qui fera du football ou de l’haltérophilie, ce que confirme Catherine Louveau « elles sont d’autant moins médiatisées qu’elles font du foot, du rugby, de l’haltérophilie, de la lutte etc. C’est-à-dire des activités jugées « non féminines » et dites non vendables ». Selon Rosarita Cuccoli – Présidente du Réseau européen Femmes et Sport » du think tank Sport et citoyenneté, la couverture médiatique du sport féminin en 2013 tourne autour des 5%, et ce malgré l’augmentation de la participation des femmes au sport dans le dernier quart du 20^e siècle.

Moins retransmises à l’écran si elles pratiquent des sports perçus comme masculin, leur apparition sera cependant favorisée selon leurs tenues. L’exemple des tenues obligatoires demandées aux sportives féminines montrent également à quel point le maintien de la féminité est essentiel lorsque que l’on parle de sport féminin. En 2013, la Ligue Féminine de Handball (LFH) vote pour rendre le port de la jupe obligatoire pour les joueuses professionnelles. Si la tentative a échoué grâce à une forte mobilisation médiatique, l’exemple est flagrant du sexisme ambiant dans le milieu sportif et de l’importance des tenues. En effet, sans une forte mobilisation féminine, le vote aurait sans doute passé. Il est aussi intéressant de voir que le comité de direction ayant pris la décision est constitué à 80% par des hommes.

Le « prix à payer », comme le dit Catherine Louveau : en effet, pour apparaître à l’écran, revêtir des tenues sexy est un avantage.

Dans le témoignage qu’elle livre aux Inrokuptibles, la sociologue et sportive Béatrice Barbusse s’exprime sur cette question de l’habillement :

En bref, le sport reste un milieu sexiste où les femmes font face à des discriminations sous diverses formes (accès difficile à certaines disciplines, rémunérations inéquitables, remarques sexistes), et bien que le nombre de femmes pratiquant des sports est en augmentation, le genre de remarques auxquelles elles font face, par exemple, n’évolue pas forcément.

Pour aller plus loin :

Francopolis, “ Pierre de Coubertin, un visionnaire réactionnaire”, 2004. URL: http://www2.hu-berlin.de/francopolis/germanopolis/db/sisdb.cgiuserid=guest&pw=guest&login=Gast&db=fr&view_records=1&lang=fr&ww=on&ID=1427

MARLIER, Fanny. « Pourquoi le sexisme est omniprésent dans le sport », Les Inrockuptibles, 05/11/2016. URL : http://www.lesinrocks.com/2016/11/05/actualite/sexisme-omnipresent-sport-11876957/

LOUVEAU, Catherine. « Les femmes dans le sport : inégalités et discriminations », Mediapart, 4 août 2012. URL : https://blogs.mediapart.fr/edition/la-revue-du-projet/article/040812/les-femmes-dans-le-sport-inegalites-et-discrimination

CUCCOLI, Rosarita. « Les femmes, le sport et les médias », Huffingtonpost, 28/11/2013. URL : http://www.huffingtonpost.fr/rosarita-cuccoli/femmes-sport-medias_b_4349417.html