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Convention d’Istanbul: instrument au service de l’égalité

Convention d’Istanbul: instrument au service de l’égalité

Auteurice Léonore Friedli, 14 avril 2018
Illustrateurice

Photo de couverture par Adam Marcucci

 

Le 14 décembre 2017, la Suisse ratifiait la Convention d’Istanbul. Ce texte entrait en vigueur le 1er avril dernier. Mais quelle est la nature et quels sont les effets de ce texte ? Explications.

La Convention d’Istanbul est un traité européen contraignant visant la réalisation concrète de l’égalité homme-femme et l’éradication des violences de toute nature faites aux femmes. La Convention du Conseil de l’Europe sur la prévention et la lutte contre la violence à l’égard des femmes et la violence domestique, plus connue sous le nom de Convention d’Istanbul, est un traité européen, qui se veut être un instrument juridique tentant de cadrer et de contraindre les pays signataires dans le domaine des discriminations de genre, plus précisément encore dans celui de la violence de genre.

Sujet brûlant, trop souvent tu par les médias ou délivré de manière biaisée (voir une excellente compilation d’euphémismes pour décrire cela dans la presse sur le tumblr Les mots tuent), la violence domestique est plus qu’une discrimination de genre : elle peut aller jusqu’au meurtre au sein d’un foyer. En France, par exemple, une femme est tuée par son compagnon (ou son ex-compagnon) tous les trois jours, selon un article du Parisien. En Suisse, ce sont 19 personnes (dont 18 femmes) qui sont mortes de la violence domestique en 2016, d’après Le Nouvelliste.

Photo par Sydney Sims

Objectif: prévenir les violences faites aux femmes

La Convention d´Istanbul annonce d’emblée dans son préambule que la « réalisation de jure et de facto de l’égalité entre les femmes et les hommes est un élément clé dans la prévention de la violence à l’égard des femmes ». $

En Suisse et dans d’autres pays, l’égalité de jure – à savoir sur le plan juridique, dans la loi – est effectivement de mise, ce qui n’est pas le cas de son application concrète, comme le prouve notamment l’inégalité salariale qui subsiste encore et toujours. À ce sujet, l’on pourra notamment consulter les infographies très instructives du Monde.

L’objectif principal et ambitieux de la Convention est de « protéger les femmes contre toutes les formes de violence, et de prévenir, poursuivre et éliminer la violence à l’égard des femmes et la violence domestique” (art.1, al.1a). Le texte traite à la fois des violences physiques, psychologiques, mais également sexuelles envers les femmes.

Redéfinition des violences sexuelles dans la loi

Dans le domaine des violences sexuelles, le Conseil de l’Europe propose d’ailleurs un processus de révision des législations nationales en matière de viol. La Convention stipule que le viol est une infraction pénale définie comme suit : « pénétration vaginale, anale ou orale non consentie, à caractère sexuel, du corps d’autrui avec toute partie du corps ou avec un objet » (art.36, al.1) et que tout autre acte à caractère sexuel non consenti est considéré comme une violence sexuelle.

Cette définition est beaucoup plus large que la définition très restrictive en vigueur actuellement en Suisse, comme le rappelle très justement un article récent du Temps. En effet, dans la législation suisse, n’est considéré comme viol qu’une pénétration vaginale. Ainsi, une fellation ou une sodomie forcée ne sont pas punies en tant que viol mais en tant que « contrainte sexuelle » et un homme ne peut actuellement en aucun cas « se faire violer  » en Suisse. Cette simple variation de dénomination entraîne donc des peines beaucoup moins sévères.

Photo par Jonathan McIntosh

La route vers l’égalité encore longue

Pour arriver à ses fins, le Conseil de l´Europe propose de prendre diverses mesures. Les articles 14 et 15 de la Convention d´Istanbul sont très intéressants, en cela qu’ils incitent les pays signataires à mettre en place des campagnes de sensibilisation au sein même des systèmes éducatifs en regard de la discrimination de genre et des rôles genrés.

Lorsqu’on se souvient du tollé que provoque la simple mention du mot « genre » à l’école française, on peut penser que le chemin vers une situation satisfaisante est encore long. En outre, le Conseil de l’Europe encourage les médias à « prévenir la violence à l’égard des femmes et renforcer le respect de leur dignité » (art.17, al.1) en instaurant, notamment, des lignes directrices et des « normes d’autorégulation ».

En définitive, la Convention d’Istanbul, comme bien des conventions et autres chartes internationales (à l’image de nombreuses lois nationales), rend très bien sur le papier et lors de sa ratification solennelle. Espérons que son application concrète soit aussi efficace que son texte est prometteur.

 

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