Nous connaissons Halloween comme la fête du macabre et des fantômes. Cependant, Samhain, une tradition ayant lieu à la même époque de l’année et également concentré sur l’au-delà, n’a rien de terrifiant. Des sorcières nous expliquent leur point de vue et leurs pratiques.
Halloween est bel et bien là : les vitrines des magasins affichent des tons orangés et noirs, les bonbons se vendent au kilo, et moult familles ont décoré leurs maisons en préparation à la venue des enfants. Pendant ce temps, les sorcières des temps modernes ont célébré ce qu’on peut considérer comme son équivalent païen, Samhain, un mot irlandais signifiant littéralement « fin des récoltes ». DécadréE a eu l’occasion d’échanger avec deux sorcières, l’une en Suisse, l’autre en Irlande au sujet de leurs rites, de leurs préparations et de la nature de leurs pratiques.
La pratique de Rose (Suisse)
Rose, qui exerce sa magie depuis plus de dix ans à Genève, est une sorcière chevronnée.
Samhain, c’est la fin de l’été et le début de l’automne : on passe de la vie à la mort. Ainsi, je pense beaucoup à mes ancêtres. Comme le voile entre le monde des esprits et le nôtre est plus fin en ce moment, c’est une période très propice pour tout ce qui relève de la divination : on peut demander conseil à ses ancêtres, si on le souhaite, et on a plus de chances d’obtenir une réponse. J’ai parfois allumé une bougie à ma fenêtre, le soir, pour mieux guider les esprits dans leur passage. D’autre sorcières se rendent au cimetière, pour faire des offrandes de romarin ou d’eau fraîche aux tombes de leurs aïeux.
Certaines sorcières vénèrent une ou des divinités ; de mon côté, je me tourne vers la nature. Pour moi, c’est aussi l’occasion de la remercier pour ce qu’elle nous offre au long de l’année. Je prépare un dîner en utilisant uniquement des ingrédients de saison : carottes, pommes de terre, courges… Il s’agit de mettre de l’intention dans les petites actions du quotidien. Par exemple, si je rajoute du sel à ce que je cuisine, c’est entre autres pour sa valeur protectrice. Je sors aussi beaucoup dans la nature. Je m’imprègne des odeurs, des couleurs, des bruits, et je ramasse des petits objets pour en faire des offrandes sur mon altar : des feuilles mortes, des pommes de pin…
J’interroge Rose sur son utilisation du mot « altar » plutôt que l’équivalent français « autel ».
En vérité, j’ai appris le plus gros de ma pratique en anglais. Même si ce n’est pas ma première langue, c’est en anglais que je fais tous mes rituels. On manque de ressources fiables en français ! J’ai commencé à m’intéresser au sujet grâce à une amie païenne, et j’ai appris le tarot et l’astrologie grâce à des proches. Mais j’ai appris la majeure partie seule, ce qui fait que ma pratique est très personnelle. Tout le monde ne célèbre pas de la même façon !
La pratique d’Áine (Irlande)
Áine, sorcière en herbe dublinoise, raconte quant à elle la pratique de sa grand-mère, qui a ensuite inspiré son propre parcours dans la sorcellerie.
Chaque année, avec ma grand-mère, nous allions au cimetière pour y honorer nos ancêtres. On y nettoyait les tombes, et on y déposait des fleurs en offrande. Pendant Samhain, la séparation entre le monde des esprits et le nôtre est plus perméable : c’est de là que vient l’importance qu’on accorde à nos aïeuls. Elle observait également une autre tradition à ce sujet. Quand elle cuisinait, elle faisait toujours un peu plus de nourriture que d’habitude. C’était, bien sûr, pour en offrir à nos ancêtres.
Ma grand-mère est malheureusement décédée il y a plus de dix ans. Depuis deux ou trois années maintenant, j’essaie à mon tour d’assembler des connaissances en la matière. Mais il semble qu’elle n’ait rien écrit sur sa pratique ! Je consulte donc des sources extérieures pour préserver autant que possible cette tradition : c’est très important pour moi de pouvoir avoir cette connexion aux ancêtres, dont fait maintenant partie ma grand-mère. Mais pour le dire concrètement, il y a énormément de bullshit sur internet !
Cet Halloween, je vais célébrer avec mon copain, à l’Irlandaise : nous allons voir un feu de joie, et je vais manger du báirín breac avec les personnes qui me sont chères. Le báirín breac, souvent anglicisé à Barmbrac, c’est une pâtisserie irlandaise. Avant la cuisson, on y insère des petits objets, et selon l’objet que l’on trouve dans sa part, on reçoit une prémonition pour son avenir. Entre autres, une bague signifie que l’on va se marier bientôt, et une pièce de monnaie signifie qu’on va devenir riche !

Rose et Áine insistent toutes deux sur l’importance accordée aux ancêtres, ainsi que la valeur de la nourriture. Une pratique personnelle, donc, mais dont on peut bel et bien relever quelques points communs. Autre similarité : la présence des ancêtres n’a rien de terrifiant, comme les fantômes d’Halloween. Au contraire, même si on y traite de la mort Samhain reste une célébration, dont ces deux sorcières gardent des expériences positives et épanouissantes.
Légende de l’image de titre : Pour Samhain, les sorcières ramassent des objets dans la nature, allument une bougie pour leurs ancêtres, ou encore font des tirages de cartes de tarot. Photo prise par Elizabeth M.