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Victimisation secondaire: ce que le procès Depardieu dit des médias suisses

Victimisation secondaire: ce que le procès Depardieu dit des médias suisses


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Décryptage

En mars 2025, Gérard Depardieu comparaissait à Paris pour agressions sexuelles. Mais au-delà des faits reprochés à l’acteur, c’est un autre phénomène qui s’est imposé à l’audience : la victimisation secondaire. Cette forme de violence institutionnelle s’est manifestée tout au long du procès, notamment à travers la stratégie de défense de l’accusé. Et en Suisse ? Si certains médias ont su questionner ces mécanismes, d’autres sont passés à côté d’une analyse essentielle pour comprendre la violence institutionnelle à l’œuvre.

Mais c’est quoi, la victimisation secondaire ?
La victimisation secondaire, c’est cette deuxième violence que subissent les personnes victimes de violences sexistes ou sexuelles. Elle ne vient pas de l’agresseur, mais des institutions censées les protéger : la police, la justice, les médias.

Elle se manifeste par des remarques ou des procédures qui remettent en cause leur parole, les culpabilisent ou les réduisent à des stéréotypes. C’est quand on demande à une plaignante pourquoi elle a attendu pour porter plainte, ce qu’elle portait ce jour-là, ou si elle a résisté. C’est aussi quand on la fait passer pour instable, manipulatrice ou intéressée.

Ce phénomène est reconnu par des instances comme la Cour européenne des droits de l’homme (CEDH), mais il reste peu connu du grand public. Pourtant, il est central pour comprendre pourquoi tant de victimes renoncent à porter plainte — ou se rétractent après avoir parlé.

Le procès Depardieu : la victimisation secondaire comme stratégie judiciaire
Plusieurs médias (1) ont relevé que pendant ce procès de Gérard Depardieu, la défense ne s’est pas limitée à contester les faits : elle a directement ciblé la crédibilité des plaignantes.

En effet, l’avocat Jérémie Assous a multiplié les attaques délégitimant les récits des plaignantes : «menteuses», «hystériques», «vénales». Il a suggéré que les plaignantes exagéraient leurs propos, qu’elles jouaient un rôle, qu’elles cherchaient l’attention. Ce discours relève d’une stratégie assumée de discrédit fondée sur des stéréotypes sexistes.

Les termes utilisés par la défense – «hystériques», «vénales», «menteuses» – ne sont pas neutres. Ils s’inscrivent dans une longue tradition de discours sexistes utilisés pour discréditer la parole des femmes :

➜ «Hystérique» : ce mot vient historiquement du mot grec hystera (utérus). Il a été utilisé pendant des siècles pour faire passer les femmes pour instables, excessives, émotionnellement irrationnelles. Aujourd’hui, il renforce l’idée que les femmes seraient par nature irrationnelles et/ou incontrôlables.
TV5 monde, 29.01.2024, «"En finir avec l'hystérie féminine" ou comment déconstruire un symbole du patriarcat»

➜ «Vénale» : accuser une femme de vouloir «attirer l’attention» ou «chercher de l’argent», c’est insinuer que son témoignage est motivé par intérêt, non par vérité. C’est un stéréotype courant, notamment dans les affaires de violences sexuelles, qui détourne le regard de la violence subie.
L’Humanité, 19 mai 2022, «Violences sexuelles : non, elles ne portent pas plainte pour l’argent»

➜ «Menteuse» active le mythe – infondé – des fausses accusations, alors que celles-ci sont très rares (entre 3 et 10 % des plaintes selon les études les plus larges, souvent moins).

Des associations féministes, des avocates et plusieurs journalistes ont dénoncé ce qu’elles appellent une stratégie de « victimisation secondaire organisée » : une violence qui s’exerce publiquement, dans un cadre institutionnel, et qui pousse les victimes à revivre leur traumatisme.

Entre analyse critique et neutralité journalistique
En Suisse, la couverture du procès Depardieu a différé selon les rédactions. Si les faits ont été largement relayés, la question de la victimisation secondaire n’a pas été relevée dans tous les médias.

Le Matin s’est démarqué avec un article titré «Procès Depardieu : la victimisation secondaire comme stratégie de défense» . Il analyse les propos de la défense et les situe dans une logique de discrédit des plaignantes. Un traitement encore rare dans la presse romande. L’article souligne notamment que “dans une salle d’audience, c’est une stratégie habituelle des  agresseurs d’inverser la culpabilité» (…). Finalement, qui est coupable? Ce sont les victimes. Elles mentent,  elles complotent, elles sont folles»”, illustrant ainsi clairement le phénomène de victimisation secondaire.

D’autres, comme RTS Info, ont opté pour une restitution factuelle des audiences. Ce choix éditorial laisse de côté les mécanismes de violence institutionnelle qui traversent ce type de procès.

Ce décalage souligne un enjeu central : comment mieux nommer les violences systémiques dans le traitement médiatique, et faire ressortir les enjeux spécifiques du traitement judiciaire des violences sexistes et sexuelles.

Des leviers pour mieux couvrir les violences sexistes
Le procès Depardieu l’a montré : la parole des victimes ne se heurte pas qu’au doute, mais aussi à des stratégies de décrédibilisation. La victimisation secondaire est souvent intégrée à la défense et normalisée dans les pratiques. Dans cette dynamique, le traitement médiatique joue un rôle central

Pour y répondre, quelques réflexes simples peuvent renforcer un traitement médiatique plus juste et plus complet:

  • Donner la parole à des expert-e-s de la violence sexiste et sexuelles (militantes, sociologues, psychologues): pour apporter un éclairage structurant, pas seulement émotionnel.

  • Aller au-delà du factuel, en questionnant les rapports de pouvoir à l’œuvre dans le cadre judiciaire.

  • Interroger les mécanismes en jeu: victimisation secondaire, stéréotypes sexistes, violences institutionnelles…
  • Ces outils aident à raconter autrement des réalités complexes, sans minimiser ni simplifier.

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    L’égalité racontée par la jeunesse ⚡️

    La jeunesse actuelle se sent concernée par quels sujets ?

    Dans le cadre de la semaine de l’égalité 2025 organisée par la Ville de Genève, les jeunes du Lab de décadréE ont pris la parole pour s’exprimer autour des questions de genre en imaginant une émission radio.

    Lillia et Liana vous guideront à travers leurs questionnements autour de l’égalité: insultes genrées, transidentités, intersectionnalité, réseaux sociaux… Elles abordent ces thématiques selon leurs points de vue de jeunes adultes avec un vécu et des expériences qui les ont poussées à se poser des questions. En quête de réponse, elles sont parties interviewer Pauline Ferrari, journaliste spécialiste de l’espace numérique, Dr Kpote, animateur en prévention autour de la vie affective et de la consommation de drogues mais aussi et surtout, d’autres jeunes concerné-exs par ces thématiques.

    Qu’est-ce que ça veut dire être adulte ? Que ressent une jeune personne queer ou une jeune personne issue de l’immigration dans l’espace publique ? Qu’est-ce ça veut dire “discrimination”? Est-ce que la discrimination positive existe ?

    Ces questions abordées par des jeunes personnes concernées apportent des éclairages sur les vécus et les préoccupations d’une jeunesse bien loin des stéréotypes négatifs actuel qui gravitent autour de cette tranche de la population qui n’a qu’une envie: que les choses évoluent et s’améliorent.

    Crédits

    Un projet en collaboration avec le Service Agenda 21 –Ville durable de la Ville de Genève et les bibliothèques municipales de la Ville de Genève

    Conceptualisation, réalisation et animation: Lillia Barbey et Liana Steiner

    Accompagnement: Erica Berazategui et Julie Bianchin

    Participation et intervention: Meryam Azzahiri, Kassia Da Costa, Ondine Deruaz-Scheiblin, Gabriel Faraut, Mathis Gertsch, Cyrielle Jaber, Alice Liermier, Maria Mehdi, Leila Mohamed, Irène Ngah, Gabrielle Nlom, Yan Rüfenacht, Aryane Silva dos Santos, Denis Thaqi, Mitchelle Theury

    Ont participé à la conceptualisation: Diane Derouet, Sarah Gay-Balmaz

    Remerciements: Pauline Ferrari, Didier Valentin (a.k.a. Dr Kpote), les bibliothèques municipales de la Ville de Genève, le Service Agenda 21 – ville durable, Trait d’union Evase

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    Institut de recherches et de formations et laboratoire d’idées sur l’égalité dans les médias, décadréE propose des formations dans les domaines de la communication et écriture inclusives ainsi que traitant des thématiques égalité et médias.

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